Le sujet du défi blog « the 20th in America » de ce mois-ci porte sur nos plus grandes surprises en arrivant aux Etats-Unis. Vaste sujet !
Même si les USA sont un pays développé et beaucoup plus proche de la France que ne le sont par exemple la Chine ou la Côte d’Ivoire (au hasard), il n’en demeure pas moins qu’il y a une multitude de détails, petits ou grands, qui surprennent le nouvel arrivant :
- Les installations électriques aériennes à l’apparence très chaotique (beaucoup de lignes ne sont pas enterrées) ;
- Les noms de rue généralement bien indiquées (on ne passe pas 2 minutes à chercher la toute petite plaque bleue de toute façon illisible depuis la voiture) ;
- Tout un système de signalisation routière à réapprendre ;
- Le broyeur dans l’évier de la cuisine pour éviter qu’il ne se bouche trop fréquemment ;
- Les nouvelles fêtes que l’on découvre ou que l’on redécouvre à la sauce américaine (et quand il n’y a pas de fête, c’est quand même la fête : on organise un « PJ day » (journée pyjama), que l’on soit au boulot ou à l’école) ;
- Le positivisme légendaire des Américains, leur côté bon enfant et leur esprit win-win, ô combien plus agréable à vivre que notre ronchonnerie nationale !
- Les salaires payés toutes les deux semaines ;
- Les taxes qui ne sont généralement pas incluses dans les prix affichés ;
- L’alliance curieuse (que je suis toujours en train de déchiffrer) entre pudibonderie (ha, les blouses et autres draps qu’on doit enfiler à chaque examen médical ! Alors que slip et chaussettes restent la tenue d’auscultation favorite en France) et culture trash (après tout, ce sont les fabuleux inventeurs du jeu Cards Against Humanity).
Sans parler des ouvre-boîtes bizarres, de l’absence de serpillière (quelqu’un peut-il me dire où trouver une serpillière dans ce pays ???), ou des aspirateurs verticauxprédominants (pourquoi ???)
Bref, quand j’ai commencé à faire la liste de tout ce qui m’avait surprise, celle-ci était longue ! Il y a de plus le fait que je suis restée plusieurs années dans la Silicon Valley, un endroit bien particulier des Etats-Unis, mais je vous parlerai plus en détail de cette région dans un futur billet. J’ai donc fait une petite sélection, qui va des choses les plus triviales et immédiates à des particularités culturelles qui ont mis des mois à faire jour dans mon esprit. Je pense que toutes mériteraient d’être développées dans un article à part, mais en attendant, voici mon petit pèle-mêle :
1. L’emballage en caisse par les gens du magasin (que ce soit le caissier lui-même ou une tierce personne) : beaucoup de magasins pratiquent encore ce qui s’appelle le bagging, et lorsque j’aide à mettre mes achats dans les sacs, j’ai souvent un remerciement. Au début, je me demandais même si c’était un service qu’il fallait tipper, comme lorsque les associations emballent les courses lors des vacances de Noël en France. Et après tout, on donne des pourboires pour beaucoup plus de choses qu’en France. Que nenni, cela fait partie du service au client ! Vous pourrez même vous faire raccompagner à votre voiture si vous avez besoin d’aide pour porter les courses, et il m’est arrivée de ne pas avoir le choix, notamment lorsque je me traînais un gros ventre en fin de grossesse.
2. La direction des tables à langer: je sais, c’est un sujet ultra-spécifique, mais les Américains changent les bébés de façon perpendiculaire, alors qu’en France, la tendance est d’avoir l’enfant face à soi. Cela semble un détail, mais je me demande si des chercheurs ont regardé l’effet que cela avait sur le développement de la latéralisation chez les enfants. Et de façon pratique, il m’a été difficile de trouver une table à langer où poser Lottie en face de moi. Heureusement qu’Ikea s’est installé dans le pays, sinon le seul autre modèle disponible ressemblait à un vaisseau spatial ! Et de façon non pratique, je galère toujours un peu lorsqu’il faut que j’utilise une table à langer publique.
3. Les horaires de dîner : les américains dînent très tôt. J’avais lu quelque part une règle culturelle qui disait que lorsqu’on était invité à 18h, c’était pour le dîner, et à 20h, il fallait déjà avoir le ventre plein. Cela fait toujours bizarre lorsque quelqu’un me dit qu’il a eu un « early diner » à l’heure où je buvais mon thé de l’après-midi. En pratique, cela ne change pas beaucoup notre vie, si ce n’est qu’il est parfois un peu difficile de se mettre à table avec appétit sur le coup des 17h30-18h lorsqu’on mange chez des amis. Et que comme Lottie a son goûter très tôt à la crèche, il faut qu’elle reprenne un petit snack en rentrant à la maison si je veux la faire patienter jusqu’à 19h pour le dîner.
4. Les choses dont j’ignorais qu’elles étaient françaises: nous connaissons tous les French Fries (les frites), et j’imagine que les Belges nous en veulent beaucoup. Heureusement pour leur fierté nationale, ils ont gardé la paternité des gaufres, avec les Belgian waffles ! Mais j’ai découvert que nous sont également attribués les French toasts (du pain perdu, surtout à base de brioche), les French doors (des portes vitrées) ou encore le French dressing, une sauce de salade à la tomate…
5. La prédominance de la circoncision: eh oui, la majorité des hommes américains sont circoncis ! En chiffre, cela donne 79% d’hommes circoncis en 2009 (en France, ils se déclaraient 14% à être circoncis en 2008 – tous mes chiffres viennent de cette page Wikipedia). Cependant la pratique semble évoluer à la baisse, avec un taux de circoncisions à la naissance de « seulement » 54.7% en 2010. Le savoir vous évitera bien des surprises, que ce soit dans les toilettes publiques, si vous mettez au monde un petit garçon ou dans une situation potentiellement plus intime. Et pour les particularités sexuelles plus féminines, sachez mesdames que les Américaines ont en moyenne un bonnet de plus que vous (D vs. C), comme le montre cette carte (ce blog me fait explorer des sujets décidément très très intéressants !)
6. Le coût de l’essence : c’est un grand classique, l’essence n’est pas chère aux Etats-Unis. Même avant la chute du cours du pétrole, je payais au maximum 4 dollars par gallon (0.95 €/L), et maintenant, l’essence est à 2 dollars le gallon, soit 0,48 €/L. A chaque fois que je fais le plein, je culpabilise de payer si peu cher un liquide avec une telle densité d’énergie. Je sais que le prix en France s’explique par les taxes, mais ne serait-il pas pertinent que les Etats-Unis profitent de la conjoncture actuelle pour préparer un petit trésor qui servirait à financer la transition énergétique ? D’ailleurs, Obama vient de proposer l’introduction d’une taxe de $10 sur le baril, mais vu la composition du Congrès, ne nous faisons pas d’illusion…
7. La culture du dating (de la drague ? du rencard ?) : le dating, c’est tout le rituel associé à la rencontre amoureuse. Il y a beaucoup de règles sur ce qu’il faut faire au premier rendez-vous, au deuxième etc. Ce qui m’a le plus surprise, c’est que tant que les deux personnes n’ont pas pris la décision d’être dans une relation exclusive, il est tout à faire permis d’aller voir ailleurs. On peut donc avoir plusieurs dates à la fois, c’est dans les mœurs. Vous me direz que c’est peut-être le cas maintenant en France et que c’est plus une question de génération que de culture… j’avoue que je manque un peu de pratique…
8. La tolérance des Américains pour leur langue, et la prégnance des langues minoritaires : l’anglais est une langue très flexible, il est facile de faire des néologismes, et il n’y a pas d’autorité régulatrice de la langue comme notre Académie Française. A mes quelques questions sur des nuances grammaticales, on me répond souvent « either way » (« les deux marchent »). Bref, les Américains ne se prennent pas trop la tête sur la grammaire, et il semble par ailleurs que celle-ci soit enseignée beaucoup plus tard (et bien moins) qu’en France. Le niveau de langue ne semble pas être un marqueur social aussi important, et on n’est pas obligé de maîtriser l’imparfait du subjonctif pour être accepté dans la bonne société. Rassurez-vous, il y a comme dans tous les pays des ayatollahs de la phrase correcte !
De même, est-ce parce que l’anglais est tellement prédominant que sa suprématie n’est pas remise en cause, mais il n’y a pas de loi Toubon aux Etats-Unis (ah, le vieux traumatisme du français démis de son statut de lingua franca !) et l’on peut voir des publicités entièrement en espagnol, voire en vietnamien ou en chinois en fonction de l’endroit où l’on se trouve (il faut dire qu’il y a 52 millions d’hispanophones aux Etats-Unis, soit 16% de la population [source]). Bien souvent, lors de démarches officielles ou auprès d’entreprises privées, on peut opter pour l’espagnol au lieu de l’anglais. Et des services des traductions sont souvent proposés dans les hôpitaux ou les banques. Bref, une terre d’immigration qui facilite la vie aux nouveaux arrivants.
9. Le statut des enfants, et notamment de la petite enfance: Pamela Druckman a écrit tout un livre sur son expérience d’élever un enfant à Paris ( »Bébés made in France »), et l’on pourrait faire pareil pour les Etats-Unis. Il y a tellement de choses à dire, qui commencent dès la grossesse, que c’est bien souvent le sujet des articles de ce blog. Il y a notamment énormément d’activités à faire avec les jeunes enfants, et pas seulement le week-end sur rendez-vous trois semaines à l’avance : musées des enfants, salles de gym, histoires dans les bibliothèques, cours en tout genre, groupes de mamans… Que ce soit en Californie ou en Pennsylvanie, je peux occuper Lottie tous les jours de la semaine avec une activité spéciale. L’anniversaire des « un an » est également une véritable institution. Cette « richesse » a évidemment son revers de médaille, avec des inégalités qui s’installent très tôt entre classes sociales, et des inégalités professionnelles entre les hommes et les femmes, puisque ce sont souvent celles-ci qui investissent plus de temps dans l’éducation des enfants.
10. La culture du don: les Américains sont beaucoup plus généreux que les Français, et je rappellerai seulement les chiffres que j’ai donnés dans un précédent billet: les dons moyens par foyer fiscal sont de 436 € en France, contre 2706 € aux Etats-Unis !
11. L’organisation politique du pays: comme la politique étrangère est la prérogative de l’Etat fédéral, c’est surtout de la politique de Washington dont on entend parler en France. En pratique, beaucoup de décisions sont prises au niveau des Etats, des counties (sorte de mini-départements), voire des villes. Certains conservateurs se battent contre des politiques fédérales non pas par opposition bête et méchante, mais parce qu’ils estiment que certaines décisions doivent rester la prérogative des Etats et non de l’Union. Des politiques qui nous paraissent de façon évidente devoir être centralisées (comme l’éducation) sont gérées par des échelons beaucoup plus proche des citoyens. On peut citer par exemple le code de la route qui est différent dans chaque Etat, ou encore le fait de pouvoir utiliser ou non des sacs et conteneurs jetables en magasin, ce qui dépend du county ou de la ville. La régulation des loyers (ou malheureusement l’absence de régulation) est décidée par les conseils municipaux, tout comme l’augmentation du salaire minimal au-dessus du niveau fédéral. Ce qui fait qu’il est beaucoup plus aisé d’expérimenter des politiques audacieuses au niveau local, comme la ville de Seattle qui est à l’avant-garde du mouvement « Fight for 15 », c’est-à-dire l’obligation d’avoir un salaire minimum de 15 dollars par heure contre les 7,25 dollars imposés par la loi fédérale.
12. Les discussions politiques: les sujets de débat politiques sont différents de ceux que l’on peut entendre en France, comme par exemple la controverse sur l’obligation d’avoir une carte d’identité avec photographie pour voter: cela nous semble évident en France, mais ça ne l’est pas du tout aux Etats-Unis, où d’autres moyens peuvent être utilisées, comme la signature ou le témoignage d’un garant (voir une carte ici : encore une fois un exemple de la latitude législative qu’ont les Etats). Il semble que les Etats qui cherchent à faire passer ce genre de lois le font pour décourager le vote des classes socio-économiques défavorisées. Un autre exemple me vient d’une émission de Freakonomics Radio qui évoquait le tarif unique du timbre : pas une seule fois il n’a été question de péréquation tarifaire sur l’ensemble du territoire, et des mécanismes qui assurent une solidarité et donc une cohésion nationale. D’ailleurs, la notion de péréquation ne semble pas avoir cours aux Etats-Unis : la page Wikipedia sur le sujet (equalization payment en anglais) explique qu’il n’y a tout simplement pas de mécanisme fédéral qui visent à réduire les disparités fiscales (avec quelques nuances).
Et pour conclure, une petite illustration faite maison, avec un extrait de la chanson « Democracy » de Leonard Cohen : j’aime beaucoup cette expression qui je trouve sied bien à l’Amérique.
Crédit photos :
[1] Table à langer : photo de Laura Tomàs Avellana, sous license CC BY-NC 2.0
[2] French doors : photo de Steve Elgersma, sous license CC BY-NC-ND 2.0
[3] French toasts : photo de Ralph Daily, sous license CC BY 2.0
[4] French dressing : photo de Jason Lam, sous license CC BY-SA 2.0
[5] French fries : photo de Jim Larrison, sous license CC BY 2.0
Cet article participe au défi blog « The 20th in America » initié par Laetitia de French Fries and Apple Pie et Isabelle du blog FromSide2Side.
- Isabelle, avec « 50 choses qui m’étonnent aux USA »
- Expat école à la maison, avec « Vos 10 plus grandes surprises en arrivant aux USA »
- Poppy, avec « 10 choses surprenantes aux US »
- Stéphanie, avec « 15 choses qui m’ont surprise en arrivant aux Etats-Unis »
- A nous la Californie, avec « 10 choses surprenantes aux USA »
- Kirsten, avec « 10 choses qui m’étonnent aux USA »
- Catherine, avec « Mes 13 plus grands chocs culturels aux Etats-Unis »
Et les machines à laver-sorbetières ?
Il faudrait essayer de faire de la glace dedans !