Beaucoup de blogueurs amateurs comme moi sont sujets à un moment ou à un autre à des questionnements ontologiques du type: mais pourquoi je fais cela ? Y a-t-il quelqu’un qui me lit ? Est-ce que le blog ne prend pas trop de place dans ma vie ? Le blogueur, qui par définition aime partager, fait aussi souvent part de ses états d’âmes à ses lecteurs. Bien sûr, je n’échappe pas à ce phénomène, et je vais donc m’adonner à ce genre d’exercide dans le présent billet (en essayant de ne pas faire trop dans la complainte du bloggeur incompris). Mes interrogations existentielles viennent du fait que j’ai assez peu de visiteurs, et encore moins de commentaires. J’ai regardé en ligne les bons conseils pour développer un blog personnel, et ma conclusion, c’est que je ne suis tout simplement pas prête à faire ce qu’il faut pour que mon blog décolle et devienne le succès planétaire qu’il mériterait d’être (non, vraiment ?) Voilà pourquoi :
- Je n’ai pas de ligne éditoriale: il paraît qu’il faut se cantonner à un sujet, par exemple la mode, les cosmétiques, la parentalité ou encore l’expatriation. Cela permet de fidéliser le lecteur, il vient sur le blog en connaissance de cause, en sachant qu’il va lire quelque chose qui l’intéresse, et qu’il partagera potentiellement avec d’autres personnes aux intérêts similaires. De mon côté, je suis trop touche-à-tout: vous pouvez vous connecter pour lire un nouvel article et vous retrouver devant « le livre du mois » (dont vous vous fichez complètement parce que vous n’avez pas d’enfants ou qu’ils sont déjà grands), un article sur la vie aux Etats-Unis (que vous n’aimez pas parce que les Etats-Unis, c’est ce pays de capitalistes sans moral/obèses aculturés qui ont élu Trump à leur tête) ou encore un article de cuisine (dont vous n’essayerez pas la recette parce que vous êtes de toute façon bien meilleurs cuisiniers que moi – et pour le coup, je ne peux pas vous faire de reproche !)
- Je ne raconte pas (beaucoup) ma vie : je n’utilise pas ce blog pour faire du « 3615 ma vie », parce que je ne pense pas que ce soit un sujet très intéressant. Ici, pas d’article sur mon mariage à l’arrache (mais bien sûr magnifique et très émouvant), l’utilisation d’une hypothétique coupe menstruelle (merci la blogosphère de m’avoir informée sur ce genre d’avancée technologique), ou mon bébé à un mois, mon bébé à 2 mois, mon bébé à 3 mois, mon bébé a fait caca et je pense que je vais lui mettre une coupe menstruelle dans les fesses… Oui mais voilà : si je suis honnête avec moi-même, il y a des blogs que je suis parce que j’aime les billets qui racontent les états d’âmes et les petites aventures de leurs auteurs. C’est un peu (beaucoup ?) du voyeurisme, la petite excitation de lire une sorte de journal intime, mon péché mignon de télé-réalité – sauf que c’est du blog-réalité, et que c’est moi qui sélectionne les candidats que je veux suivre. Je n’applique pas les bonnes règles pour créer une addiction sur un site (comme je l’explique dans cet article). Il n’y a pas de « la suite au prochain numéro », « dans le prochain billet, je vous raconterai la folle aventure qui m’est arrivée hier », bref, pas de motivation à revenir sur mon site pour avoir sa petite dose de dopamine quotidienne.
- Je ne publie pas très régulièrement: il y a des périodes où j’ai le temps, et surtout l’envie d’écrire et de partager des choses, et dans ce cas, il m’arrive de publier jusqu’à deux articles par semaine. Il y a des périodes où je suis concentrée sur d’autres projets, ou pendant lesquelles je n’ai pas envie de passer des heures à travailler un article (ce qui me prend beaucoup plus de temps que vous ne passez à le lire!) Il m’est arrivé de traverser de longs mois sans rien publier depuis que j’ai démarré ce blog en 2013, et je vous accorde qu’il est très facile pour un lecteur de décrocher dans ces moments-là.
- Je ne suis pas active sur les réseaux sociaux: j’ai supprimé mon compte personnel Facebook et mes plus de 300 « amis » il y a quelques années, car j’estimais que ce que j’en retirais ne valait pas le temps passé. J’ai depuis recréé un compte parce qu’une amie m’a convaincue que c’était bon pour mon petit business Tea & Tins, et puis les groupes Facebook sont beaucoup utilisés au US, que ce soit des groupes de parents, pour l’école des enfants ou les expatriés francophones. Du coup, c’est quand même bien pratique. Mais si j’en crois les conseils à destination des blogueurs, il faudrait que je sois sur Instagram et Twitter également. Merci, mais non merci. C’est un choix que je fais consciemment de ne pas y dépenser cette ressource précieuse qu’est mon temps autonome (par contraste avec le temps hétéronome, duquel on ne décide pas de l’utilisation : le temps travaillé bien sûr, mais aussi le temps de s’occuper des enfants ou des tâches domestiques). Bon, j’ai quand même ajouté récemment une fonction de partage sur les réseaux sociaux, alors vous savez quoi faire si vous appréciez cet article 😉 .
- Je ne m’implique pas beaucoup dans la blogosphère et je n’ai pas un gros réseau de copines blogueuses. Maintenant que je blogue et que je sais combien cela fait plaisir, je fais davantage d’efforts pour laisser des commentaires sur d’autres sites lorsque j’ai quelque chose de pertinent à dire, et je participe de temps en temps à une ronde des blogs (The 20th in America), mais il faudrait que je fasse plus d’actions pour améliorer ma visibilité auprès des autres blogueurs – qui sont souvent eux-même grands lecteurs de blogs et susceptibles de faire connaître le mien.
- Mon blog n’est pas très esthétique: cela va un peu mieux depuis que je suis passée à WordPress, je suis même mobile-friendly maintenant, c’est vous dire si j’en fais, des efforts! Mais je reconnais que je n’ai pas le plus beau blog de la terre, et que j’adorerais avoir un style minimaliste-épuré avec trois tons de blanc et des couleurs pastelles – mais j’ai la flemme d’y passer le temps nécessaire. Bref, ma mise en page ne crie pas « bienvenue dans mon univers » comme il le faudrait.
- Mon style d’écriture est très classique: il y a des blogs que je lis et vers lesquels je reviens parce que j’aime le ton particulièrement caustique, humoristique ou sarcastique de leurs auteurs. Je sais que je vais passer un bon moment en lisant leurs billets, un peu comme lorsqu’on regarde une vidéo d’un comique qu’on aime bien. De mon côté, j’ai un style direct, sans fioriture ni les jolies figures de style « phrase sans verbe » ou répétition que j’affectionnais lorsque j’étais ado. J’aime bien glisser des mots un peu compliqués de temps en temps, et je pense que cela doit plus vous énerver que vous ravir (au temps pour l’auteur qui veut s’attacher l’affection de ses lecteurs!) Mais si on ne se sert pas du vocabulaire, il dépérit, alors c’est ma petite bataille personnelle – de sortir quelques mots du dictionnaire et de les mettre en plein jour, là, sur cette page de blog.
Voilà donc toutes les raisons pour lesquelles je blogue mal, et pour lesquelles cela va continuer. Je ne me donne pas les moyens d’avoir un lectorat assidu, qui en redemande et qui m’aide à faire grandir mon audience. Je blogue par plaisir, et j’espère que si vous me lisez, c’est que vous y trouvez un intérêt également, même si ce n’est pas pour tous les articles.
Au passage, le lien en français le plus intéressant sur lequel j’ai atterri lors de mes recherches pour nourrir ma réflexion est un article de Sébastien Rouquette, intitulé « Les blogs « extimes » : analyse sociologique de l’interactivité des blogs ». Déjà, j’ai appris un nouveau mot (le néologisme extime, en gros une intimité projetée vers l’extérieur) et ensuite, l’article est intéressant, notamment le passage de la valorisation des identités en tant que blogueur. A mettre dans toutes les mains des personnes tenant un blog et en période de questionnement existentiel. Vivre pour bloguer, ou bloguer pour vivre?
Personnellement, quand je ne laisse pas de message, c’est que je n’ai pas grand chose à dire de plus …. Mais ça a l’air de vous chagriner. Je veux bien essayer de vous remonter le moral 😉 Si vous voulez rencontrer une de vos lectrices un de ces quatre ….