Myriam est arrivée aux États-Unis il y a 22 ans avec son mari. Ils ont quatre enfants de 27 et 25 ans nés en France et des jumelles de 15 ans nées aux États-Unis. Ils vivent à Pittsburgh après avoir passé 8 ans à Phoenix en AZ. Myriam a fait des études de marketing et ressources Humaines. Elle a travaillé comme responsable des ressources humaines et professeure de français pendant plusieurs années en France et à Phoenix. Elle travaille actuellement comme marketing et ressources humaines et est présidente du Centre Francophone de Pittsburgh (CFP).
Bonjour Myriam, je suis particulièrement contente que tu aies accepté de répondre à mes questions car cela fait 3 ans qu’on se voit aux évènements du CFP et je suis ravie d’en savoir plus sur ton histoire. Pour commencer, est-ce que tu peux nous parler des différences entre la France et les Etats-Unis lors de tes grossesses ?
Ma grossesse aux États-Unis a été un peu différente de celle de France pour plusieurs raisons. D’abord mon âge. Il y a une différence de 10 ans entre mon dernier enfant de France et mes premières aux États-Unis. Mon gynéco aux US n’avait pas vu que j’attendais des jumelles. Je l’ai su en faisant une amniocentèse car j’avais plus de 35 ans… J’ai déménagé enceinte de 7 1/2 mois à Pittsburgh et ça été très difficile de trouver un gynéco qui voulait bien me prendre comme patiente. C’est ma realtor [agent immobilier] qui m’a eu un premier rendez-vous avec la sienne car je ne trouvais personne. J’ai accouché à Magee qui est un hôpital spécialisé pour les femmes à Pittsburgh. J’ai eu une très bonne expérience pour l’accouchement, un peu moins pour le séjour. Ils ont trouvé une de leur infirmière française pour m’aider avec l’accouchement pour que je sois plus à l’aise. Une des jumelles a été sous incubateur car j’ai accouché à 34 ½ semaines et ils ne voulaient pas me garder. J’ai donc dû louer une chambre dans l’hôpital pour pouvoir rester sur place et allaiter. Ce n’était pas très pratique car la chambre était à l’opposé du NICU et j’avais l’autre jumelle avec moi.
Les infirmières étaient plus gentilles et patientes avec moi aux états Unis pour l’allaitement qu’en France pour les deux premier et en général. En France, elles étaient assez abruptes, ici très gentilles. Je tiens à préciser que ma belle-mère était infirmière chef d’étage dans une clinique donc j’aime les infirmières… mais j’avoue qu’à l’hôpital de Toulouse, celles qui s’occupaient de l’accouchement et après dans les chambres n’étaient pas toujours très agréables ou diplomates… Ici tout le contraire !
J’ai eu une babyshower que mes amies de Phoenix ont organisé, c’était super et nous nous sommes bien amusés, de plus cela m’a rendu service avec les cadeaux car avoir des jumelles demande beaucoup de choses à acheter…
Est-ce que tu as remarqué des différences sur la façon de traiter les jeunes enfants aux Etats-Unis par rapport à la France ?
Je trouve que les américains sont plus impliqués dans la vie et les activités de leurs jeunes enfants. Des fois un peu à l’extrême. Par contre par la suite, c’est soit très impliqué, soit laissant les enfants faire ce qu’ils veulent.
Tes enfants sont-ils allés dans une école internationale ou publique ?
Tous mes enfants sont allés à l’école américaines publique. Il n’y avait pas d’école bilingue à Phoenix où nous habitions quand nous sommes arrivés. J’ai fait la classe en français aux deux grands puis nous avons déménagé à Pittsburgh où le français est étudié à partir de la middle school. Mon ainée a sauté deux niveaux en français à la High School, mon second n’a pas voulu pour rester avec les copains. Pour les deux dernières, je suis en train de faire faire le niveau 3 à l’une cet été à la maison pour qu’elle saute une classe à la rentrée. J’ai eu l’accord de l’école et elle va passer un examen en août pour voir si elle a le niveau pour aller en classe supérieure. L’autre jumelle n’a pas voulu le faire et elles seront donc avec un niveau d’écart en français à la High School.
Est-ce que l’école aux Etats-Unis te semble très différente de l’école française ?
Je préfère l’école ici. Nous avons eu la chance d’être toujours dans de bons school districts soit à Phoenix soit dans la banlieue de Pittsburgh. Je trouve les profs plus abordables et voulant vraiment aider les enfants, les enfants qui ont des difficultés sont vraiment bien soutenus par de nombreux programmes et les parents sont bienvenus dans l’école. Les profs encouragent les élèves et trouvent toujours des côtés positifs tout en essayant d’aider quand il y a des problèmes. Par contre je n’ai pas de bon souvenir en France avec mon ainée à la maternelle et quand j’entends parler mes amis et ma famille de leurs enfants avec l’éducation nationale, je me dis que je suis bien contente d’être ici pour la scolarité primaire et secondaire. Bien sûr c’est mon expérience personnelle et peut être que d’autres personnes n’ont pas eu ma chance de bien tomber à chaque fois. De la scolarité de mes deux aînés, je crois qu’ils ont eu seulement chacun deux ou trois profs qui n’étaient pas bien (mauvais pédagogue ou qui s’en foutaient) sur toute leurs études. Donc bonne expérience…
Tes enfants ont-ils conduits seuls à partir de 16 ans ?
Mes deux aînés ont passé la conduite à 16 ans. Mon mari a donné les cours de façon qu’ils apprennent à conduire comme en France. Ici c’est assez succinct.
Comment gérez-vous l’interdiction de boire avant 21 ans ?
Pour l’alcool, pas de problème car ils avaient déjà bu de l’alcool en France en vacances à 18 ans. On a bien fait attention ici qu’ils ne boivent pas avant 21 ans ici mais ils ont appris à boire en mangeant et non pas juste comme ça. À l’université, ils étaient surpris que certains jeunes Américains trouvent du plaisir à faire du binge drinking. Bon maintenant en tant que parents, on ne sait pas tout n’est-ce pas donc j’en apprendrais peut-être de belle plus tard, lol !
Quelle place a le français dans ta famille ?
Mon mari est français et nous parlons français à la maison, les enfants nous parlent en français et en anglais. J’avoue que j’ai été plus stricte avec les deux premiers que les deux dernières. Plus âgée, plus d’enfants à m’occuper, moins d’énergie et moins de temps… C’est dur dans un environnement où le français est presque inexistant. Les enfants se parlent en anglais entre eux. On regarde des films français sur Netflix ou imovie compte français, on essaye d’aller en France tous les deux ou trois ans voir la famille et les amis et il y a les cours de français à l’école.
Tes enfants parlent-ils mieux anglais que toi ?
Oui ils parlent comme des américains (ils sont américains après tout). Les aînés sont arrivés ici à 3 ans et 1 ½ an. Les deux dernières sont nées ici. Ils se moquent de ma prononciation tout le temps mais pas méchamment. Ils sont meilleurs en anglais qu’en français. Ils ne lisent pas et n’écrivent beaucoup en français. Chez nous c’est plutôt le parler qui l’emporte. Ils écrivent à leur grand-mère par contre.
Tes enfants se pensent-ils ou se vivent-ils en tant que Français ?
Non ils se considèrent américain d’origine française.
Avoir des enfants a-t-il changé votre projet d’expatriation ?
Non, nous n’avons pas vraiment voulu revenir en France ni quand les deux aînés étaient en âge de commencer l’élémentaire, ni quand nous avons eu les deux dernières. Tout le monde nous disaient « revenez en France vous aurez les alloc » mais nous aimons vivre ici même s’il n’y a pas autant d’aide.
Avez-vous de la famille proche aux États-Unis ?
J’avais une grande tante américaine mais elle est décédée l’an dernier. Elle habitait Phoenix et était devenue la grand-mère de substitution de mes aînés quand nous étions là-bas. Pour les imprévus, les amis sont la famille que l’on n’a pas à côté. J’aime mes amis !!!!
Comment entretiens-tu le lien avec la famille restée en France ?
Difficile… Nous sommes partis donc c’est à nous de faire des efforts, nous devons venir voir tout le monde mais très peu viennent nous voir. Les contacts sont presque seulement dans un sens avec certaines personnes, nos enfants sont un peu oubliés… Apparemment nous ne sommes pas les seuls dans ce cas.
Par contre, ma mère est morte d’un cancer deux ans après mon déménagement aux états unis, ça été très dur d’être loin dans ce cas-là. Mon père est mort subitement il y a deux ans et il pleurait quand je suis repartie après une semaine de vacances avec lui quelques mois avant sa mort comme s’il savait que nous ne nous reverrions pas. Depuis les liens avec ma sœur se sont resserrer et nous nous appelons régulièrement. Ma nièce va venir vivre avec nous pour le semestre d’automne de l’université. Elle a été acceptée au programme ELI de l’université de Pittsburgh. Nous sommes ravis!
Te sens-tu en décalage avec les familles américaines ?
Des fois oui. Par exemple, on mange tous ensemble au dîner, on s’attend s’il le faut. Les américains ne font pas ça. Je cuisine variée. Les copains des enfants souvent n’avaient jamais manger de certains légumes ou plats avant de venir chez moi et des fois ne veulent pas toucher à ce que j’ai fait donc du coup je ne fais plus que des pâtes et des pizzas quand les amis de mes enfants viennent. Par contre ils adorent tous les crêpes…. J’ai du mal des fois avec les mamans américaines de l’école. Les discussions sont assez simples et les relations ne vont pas très loin. Par contre j’ai pas mal d’amies américaines mais c’est par des associations. En fait ici on se fait des amies en faisant des activités ensemble. Il n’y a qu’avec mes amies françaises ou franco-américaines que je ne fais rien à part papoter et faire la fête… Lol !
Et lorsque vous rentrez en France, te sens-tu en décalage par rapport aux autres familles françaises ?
Je me trouve en décalage avec les français de France en général dans ma façon d’agir et de penser. Bref je suis devenue une hybride 🙂
As-tu des anecdotes par rapport aux différences culturelles éducatives entre la France et les États-Unis : politesse, nourriture, discipline, sexualité ?
Nourriture oui, ici les enfants ne veulent rien manger s’ils ne connaissent pas, en France on cuisine plus variée et à la cantine c’est plus équilibré donc je pense que ça joue. Politesse… pas plus polie en France qu’ici d’après mon expérience. Sexualité plus libre en France qu’ici je dirais. Discipline : ça dépend des familles dans les deux pays.
Quelles sont les habitudes familiales américaines que vous avez adoptées ?
BBQ, regarder le superbowl, se garer le plus près du magasin lol !
Célébrez-vous les mêmes fêtes que les Américains ?
Oui nous on célèbre tout !!!
Et les anniversaires ?
On n’invite pas toute la classe. Un bon gâteau pour la famille, un gâteau de Giant Eagles pour la fête avec les copains. Tous les enfants ont toujours eu des amis pour faire une fête d’anniversaire. Soit dans un cours de gym, soit à la piscine, soit à la maison. Pour les un an des dernières, nous sommes allés montrer les jumelles à la famille en France et il y a eu une grande fête. Sweet sixteen, ma grande ne l’a pas voulu mais les deux dernières qui vont avoir 15 and en parle déjà pour leurs 16 ans 😉
Est-ce que vous pensez rester aux États-Unis ?
OUI !!!!
Vos enfants vont-ils y faire leurs études supérieures ?
Les deux premiers ont eu leur Undergraduate et Master Degree aux États-Unis, ils sont mariés avec des Américains. Les deux dernières feront leurs études ici.
Pensez-vous que vos petits-enfants seront américains ?
Oui c’est sûr.
Merci Myriam d’avoir partagé ton histoire : je trouve que c’est un beau témoignage d’une famille immigrée française qui s’est bien intégrée aux Etats-Unis tout en ayant su entretenir les bons côtés de ses origines françaises.
Myriam est présidente du Centre Francophone de Pittsburgh que vous pouvez retrouver sur Facebook : Centre Francophone de Pittsburgh / French Cultural Center of Pittsburgh.
Elle est également propriétaire de Levy Industrial : http://www.levyind.com
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« Myriam est arrivée aux États-Unis il y a 22 ans avec son mari. Ils ont quatre enfants de 27 et 25 ans » et, un peu plus loin, « Les aînés sont arrivés ici à 3 ans et 1 ½ an ».
Le calcul mental, c’est pas son fort à Mimi … ou alors c’est l’âge ….